Les dernières projections de la Compétition officielle de la 69e Berlinale ont eu lieu. Voici un rapide aperçu de 4 des 5 derniers titres.
Piranhas (titre original: La Paranza dei Bambini) (♥♥ 1/2), de Claudio Giovannesi. Inspiré du roman de Roberto Saviano, le film nous plonge dans la vie de gangs d’adolescents qui oeuvrent dans les quartiers défavorisés de Naples. Là, ils profitent de l’absence de chefs mafieux emprisonnés pour prendre peu à peu leur place sur le terrain du crime organisé et adopter les mêmes pratiques criminelles que leurs prédécesseurs.
Avec ses jeunes acteurs très convaincants et recrutés dans les quartiers populaires de Naples, Piranhas aborde efficacement une réalité aussi tragique qu’interpellante et pointe du doigt la misère sociale qui permet à la mafia de continuer à prospérer et de séduire des personnes fragilisées à la recherche d’argent facile.
A Tale of Three Sisters (♥♥ ), film turc de Emin Alper, raconte l’histoire de 3 soeurs, Reyhan (20 ans), Nurhan (16 ans) et Havva (13 ans). qui vivent avec leur père dans un village reculé d’Anatolie. Toutes 3 ont déjà eu l’occasion de travailler en ville et n’ont qu’une seule envie: y retourner au plus vite pour échapper à la vie de la campagne profonde qui leur semble être un fardeau des plus lourds à porter.
Le scénariste a eu visiblement beaucoup de travail avec A Tale of Three Sisters, car les dialogues abondent entre les différents protagonistes. Le film doit-il être qualifié de trop bavard pour autant? Non, car malgré quelques longueurs et redondances, il nous livre un portrait d’une certaine partie de la Turquie, loin des grandes villes ou des zones touristiques prisées. Une certaine audace s’installe même dans les conversations (on y parle de sexe, de plaisir, d’émancipation féminine, de mariage arrangé malheureux…), lesquelles se tiennent au coin du feu ou dans les superbes décors des montagnes d’Anatolie. Mais le drame n’est pas loin et lorsqu’il survient, le récit prend toute sa dimension.
Elisa & Marcela (♥ 1/2), de Isabel Coixet, permet à la réalisatrice espagnole de revenir à Berlin, un an tout juste après y avoir présenté The Bookshop dans la catégorie Berlinale Special. Elle a cette fois les honneurs de la Compétition officielle avec ce drame inspiré de faits réels (tout comme d’ailleurs de nombreux autres films de la Compétition cette année). Relatant l’histoire d’amour interdite de deux jeunes femmes dans l’Espagne du début du 20e siècle, Elisa & Marcela s’inscrit évidemment dans l’air du temps et ne manque pas de rappeler juste avant le générique que l’union entre personnes du même sexe reste aujourd’hui encore proscrite, voire même passible de la peine de mort, dans un certain nombre de pays. Dommage que la réalisatrice n’évite pas certaines scènes répétitives à l’eau de rose qui ôtent une partie de sa crédibilité à la mise en scène. Mais le principal mérite du film est de mettre en lumière le combat douloureux mené par ces deux femmes pour pouvoir vivre leur passion dans une société où la chose était inconcevable.
Synonymes (0), de Nadav Lapid, est surtout synonyme d’ennui et de prétention portés à leur paroxysme. Le récit raconte l’histoire d’un beau jeune homme israélien ayant fui son pays et espérant pouvoir s’installer définitivement en France. Sujet de prime abord intéressant que celui-là (et familier au réalisateur), centré autour de ces étrangers en quête d’une autre terre et d’une nouvelle vie.
Hélas, comme nous l’écrivions déjà au sujet de I was at home, but les adeptes de la masturbation intellectuelle seront probablement les seuls à s’extasier devant cet objet cinématographique qui transpire la prétention d’un bout à l’autre. Usant et abusant d’une théâtralisation excessive, le film développe une galerie de personnages caricaturaux, à commencer par le principal, Yoav (incarné par Tom Mercier) qui garde une mine figée de la première à la dernière minute, dans une succession de séquences qui frisent tantôt l’hystérie, tantôt le nombrilisme parisien le plus pénible.
Le physique avantageux de Tom Mercier, qui n’hésite pas à s’investir physiquement à plus d’une reprise, constitue probablement le seul attrait pour le regard de ce Synonymes qui, nous l’espérons, ne sera pas synonyme de récompense majeure au palmarès de cette 69e Berlinale.
Olivier Clinckart