Ursula Meier, Présidente du Jury de la Caméra d’Or

La réalisatrice suisse Ursula Meier présidera le Jury de la Caméra d’Or, en compagnie de six autres professionnels. Le prix récompensera la meilleure première œuvre présentée en Sélection officielle, à la Semaine de la Critique ou à la Quinzaine des Réalisateurs.

Ursula Meier avec l'Ours d'Argent reçu à Berlin en 2012

Le communiqué du Festival de Cannes:

Ursula Meier est une cinéaste qui s’interroge sur la nécessité de filmer. C’est sans doute la raison d’une filmographie resserrée et passionnante, qui compte 5 courts métrages, 2 œuvres pour la télévision, 2 documentaires et 2 longs métrages pour le cinéma. Ils sont autant de coups d’éclat inventifs qui bousculèrent avec fraîcheur et l’imposèrent avec évidence dans le paysage européen. Depuis 1994, Ursula Meier façonne une cinématographie audacieuse qui souligne la complexité du monde.

Admiratrice inconditionnelle de Wanda (Barbara Loden) ou Sweetie (Jane Campion), elle décide de passer à la réalisation après avoir découvert L’Argent (Robert Bresson). Elle devient alors assistante-réalisatrice d’une grande figure du cinéma suisse, Alain Tanner, avec Fourbi (1996). Celle qui se dit fascinée par l’espace du no man’s land y a construit son imaginaire et parvient à toucher des zones enfouies de la nature humaine, en filmant avec tendresse, sans pathos ni jugement, des personnages guidés par un puissant instinct de survie. En 2014, elle a participé au film Les Ponts de Sarajevo, œuvre collective portée par 13 cinéastes européens, présentée à Cannes en Sélection officielle.

Un premier film, c’est le lieu de tous les possibles, de toutes les audaces, de toutes les prises de risques, de toutes les folies.

Ses films pour le cinéma – Home (2008) et L’Enfant d’en haut (2012) qui obtint l’Ours d’Argent à la Berlinale – sont internationalement salués pour leur originalité de regard et d’écriture. Radical et poétique, le premier est une fable à la lumière blafarde et à la photographie chaude. Le deuxième est un conte moderne en forme de chronique familiale sobre et poignante.
« Un premier film, déclare la Présidente nouvellement désignée, c’est le lieu de tous les possibles, de toutes les audaces, de toutes les prises de risques, de toutes les folies. On dit souvent qu’il ne faut pas tout mettre dans un premier film mais c’est tout le contraire, il faut tout mettre dans un premier film, tout, comme il faut tout mettre dans chaque film en gardant au fond de soi, toujours, ce désir originel, vital, brutal, sauvage de la première fois. Quelle immense excitation et quelle immense joie de découvrir tous ces films ! »
Ursula Meier et son jury remettront le prix de la Caméra d’or lors de la soirée de Clôture du Festival de Cannes, le samedi 19 mai. Le film lauréat succèdera à Jeune Femme de Léonor Serraille, présenté en Sélection officielle – Un Certain Regard l’an passé.

Fiff, avec « f » comme « femme »

Le 32e festival du Film Francophone de Namur a ouvert ses portes ce vendredi 29 septembre. Pour ce 1er weekend, la programmation a fait la part belle aux femmes, avec, pour commencer en beauté, la Caméra d’Or (qui récompense le Meilleur premier film, toutes compétitions confondues) du dernier Festival de Cannes, Jeune femme, projeté en film d’ouverture et présent dans la Compétition 1e oeuvre de fiction.

La Compétition officielle, pour sa part, n’est pas en reste. Avec La belle et la meute, projeté ce samedi 30 septembre, la réalisatrice tunisienne Kaouther Ben Hania dénonce les institutions corrompues et certaines mentalités archaïques de son pays par le prisme d’une jeune femme victime d’un viol et qui doit faire face non seulement à un mur d’incompréhension, mais aussi à la complicité de la police envers les coupables, eux-mêmes membres des forces de l’ordre.

Divisé en 9 chapitres filmés sous forme de plans-séquences, le récit s’inspire d’une histoire vraie très médiatisée en Tunisie et du livre qui en a été tiré, Coupable d’avoir été violée, rédigé par la victime elle-même, Meriem Ben Mohamed. Ce combat pour la justice et pour le droit des femmes est incarné à l’écran par l’excellente Mariam Al Ferjani, laquelle donne à l’histoire toute son intensité dramatique. Si la mise en scène parfois fort théâtrale tend à enlever au récit une partie de son réalisme brut, il faut reconnaître au film son caractère d’oeuvre utile, en ce sens qu’il expose au grand jour les failles béantes d’une société qui, malgré la révolution qu’elle a initiée, a encore un long chemin à parcourir quant aux libertés fondamentales et aux droits des femmes.

Dans le même ordre d’idées, le documentaire Maman Colonelle, projeté ce dimanche 1er octobre, suit le travail au quotidien de la Colonelle Honorine, au sein de la police congolaise où elle est chargée de la protection des enfants et de la lutte contre les violences sexuelles. A travers ce portrait d’une femme courageuse, le réalisateur Dieudo Hamadi expose les réalités tragiques d’un pays dont la population a eu à subir d’innombrables souffrances liées aux conflits meurtriers qui ont secoué la République Démocratique du Congo et ce, le plus souvent dans l’indifférence ou l’ignorance du reste du monde.

Au fil des témoignages bouleversants recueillis auprès des femmes et des enfants victimes de la folie des êtres (in)humains, c’est un sentiment de profonde consternation qui se dégage du film, lequel atteint donc pleinement son but d’interpeller. Mais, et c’est là le grand mérite de Maman Colonelle, plutôt que de céder à la désespérance, Dieudo Hamadi démontre que l’espoir d’une société meilleure, aussi ténu soit-il, peut encotre émerger grâce aux initiatives citoyennes de quelques âmes bien décidées à ne pas baisser les bras.

Olivier Clinckart